trois flacons (version classique)

[Scaër]

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[MJ Barmish]

Belle image encore ; toujours dans la proximité des origines de la photographie ; personnellement, j'aime les deux versions, sans préférence marquée

[Guylepicard]

Belle image encore ; toujours dans la proximité des origines de la photographie ; personnellement, j'aime les deux versions, sans préférence marquée

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[miguelcervantes]

J’aime

Je retrouve ici ta palette de tons de terre, qui me semble caractériser la grande majorité de tes photos : des ocres, des jaunes comme les épis mûrs qui se balancent dans les champs.

C’est à ma grande surprise que j’ai récemment découvert tes cyanotypes, qui témoignent d’un tout autre univers, froid comme les sommets des hautes montagnes : un univers aérien et glacial tel que celui de Nietzsche. Ils m’ont paru très réussis en leur genre et de nature à séduire les amateurs de couleurs froides telles que le bleu, le turquoise et certains verts.

Dans ta présente photo, qui est à mes yeux une nature morte en l’absence de nature, comme nous en a soumis ici voilà quelques mois notre amie Petitelfe, j’apprécie notamment la composition, la sobriété, l’ambiance nostalgique et intimiste ainsi que le rendu des différentes textures : celle du verre et celle du vieux mur craquelé qu’on retrouve souvent en arrière-plan dans tes œuvres. C’est à mes yeux un sans-faute, un admirable tableau d’une grande cohérence, qui témoigne de ton regard, de ton expérience et de ton savoir-faire en tant que photographe.

Pour ma part, je n’ai pas d’univers colorimétrique et j’aime, en tant qu’amateur d’art, voyager dans différents univers, aussi bien l’univers terrien et nocturne de Rembrandt que l’univers aérien et diurne de Vermeer : deux cosmos, deux galaxies.

L’histoire de l’art montre que bien des peintres ont une palette de couleurs privilégiée. On pourrait croire qu’il s’agit là d’un simple hasard dû aux couleurs auxquelles ils avaient accès sur le marché dans leur environnement et à leur époque. J’ai plutôt tendance à croire, face notamment à la persistance d’une certaine colorimétrie sur une longue période chez un peintre, qu’il s’agit là de l’expression d’un regard, d’une vision, d’une nécessité intérieure.

Mettons par exemple deux peintres qui ont travaillé à la même époque, Ingres et Delacroix. Leurs approches respectives au niveau de la couleur et du dessin me semblent diamétralement opposées. C’est remarquable, et bien des historiens de l’art l’ont souligné. Je dirais que ça saute aux yeux.

Tes photos, Yves, comme les tableaux de Rembrandt et ceux de Delacroix, me semblent se caractériser par une lumière qui semble émaner de tes sujets, comme s’ils étaient incandescents, habités par une flamme intérieure, ce qui notamment tend à estomper les lignes et les contours. À ma connaissance, le premier peintre occidental à proposer une telle approche en peinture a été Léonard de Vinci, avec sa technique révolutionnaire appelée sfumato, dont témoigne notamment sa Joconde : aucune ligne ni aucun coup de pinceau n’est visible dans ce tableau séminal depuis longtemps considéré comme un chef-d’œuvre et qui me semble préfigurer l’impressionnisme.

Je te considère, Yves, comme un photographe impressionniste, loin de tout souci de documenter quoi que ce soit, encore moins un instant. Tes photos me parlent de la longue durée et du temps qui passe, qui fuit inexorablement.

Tu me sembles être sur RP le seul à avoir posté des images de plantes et de fleurs qui s’en vont, poussant leur dernier souffle de vie, encore animés par une lueur venant de l’intérieur.

Certaines de tes images me rappellent la tradition picturale des « memento mori », inaugurée au Moyen-âge. Elles me parlent aussi bien de la vie que de la mort.

Toute chose particulière et individuelle a une fin dans l’espace et le temps. Mais de la mort renaît la vie. Telle ou telle fleur ou plante est vouée à la mort, mais la vie continue. Ces fleurs et ces plantes que tu nous montres dans tes photos, leur image et leurs formes se reproduisent dans la nature depuis des millénaires.

C’est pourquoi je te vois, Yves, comme un poète, un artiste, un photographe de la longue durée.

Je note, entre autres, que tu nous as rarement ici sur RP soumis une photo témoin d’un coup d’œil ou d’un instant.
Tes photos sont à mes yeux des poèmes. Et ce qui me semble distinguer les poèmes d’autres œuvres d’art ou productions visuelles, c’est notamment qu’ils font abstraction de toute chronologie, à la manière des mythes les plus anciens.

Encore une fois, je le redis, la photographie est à mes yeux une technique qui se prête à différents usages et différentes approches.

J’aime la diversité des regards et je suis sensible à ton regard, Yves.

Comme d’autres ici, tu ouvres des fenêtres dans ma maison.

Un de mes amis poètes, aujourd'hui décédé, un jour dans un bar, voilà un demi-siècle, m'a glissé un petit mot sur une table tard dans la nuit : "Il ne faut jamais préjuger d'une voile." J'ai conservé ce mot dans mes archives.

François